Réponses à quelques questions...

Quelques réponses à un ami questionneur...

La tonalité est une organisation hiérarchique des sons par rapport à un son de référence : la tonique. L’organisation des sons de ce système selon leur hauteur constitue une gamme ; l’ordre de succession des intervalles de la gamme détermine le mode (majeur ou mineur).
Ceci étant posé... sur le piano éventuellement, passons à la gamme mineure.
Elle est issue du mode ecclésiastique éolien. Suivant les modifications du tétracorde supérieur, on distingue trois formes de mineur ; le mineur naturel (éolien), le mineur harmonique, et le mineur mélodique. Il y a aussi le mineur dit “tzigane” qui est une variation du mineur harmonique.
Ici, je suis obligé de revenir aux bases : Le système musical occidental remonte à l’Antiquité grecque. Les Grecs basèrent leur système modal sur un tétracorde (série de quatre sons) dont les notes extrêmes étaient fixes, les intermédiaires, mobiles, déterminant les trois modes possibles : le diatonique, le chromatique et l’enharmonique. Notre système utilise seulement le mode diatonique avec des hauteurs fixes. les modes grecs se composaient de 2 tétracordes, comme les nôtres, formant l’octave avec 7 sons différents.
Les modes ecclésiastique distingue 8, puis 12 divisions de l’octave d’après le modèle grec, les modes ecclésiastiques (modi), qui reçurent le nom des modes grecs :
dorien désigne ré, avec comme teneur (ton de récitation) le “la”.
hypodorien teneur “fa”
phrygien mi teneur “do”
hypophrygien mi teneur “la”
lydien fa teneur “do”
hypolydien fa teneur “la”
mixolydien sol teneur “ré”
hypomixolydien sol teneur “do”
éolien (mineur) la teneur “mi”
hypoéolien la teneur “do”
ionien (majeur) do teneur “sol”
hypoionien do teneur “mi”
Le caractère des modes ecclésiastiques n’est pas seulement déterminé par les rapports entre les degrés, mais aussi par l’organisation du plain-chant monodique :
— ambitus (étendue) ; les mélodies évoluent souvent dans un ambitus d’octave.
— finale ; tonique de la mélodie.
— teneur ; une quinte au-dessous de la finale.
— cadentielles tournures caractéristiques qui apparaissent souvent.
À chaque ton principal “authente” (ex.: dorien), correspond une tonalité secondaire “plagale” (hypodorien) avec la même finale.
L’ambitus est alors décalé d’une quarte vers le grave, la finale se trouve au milieu de l’échelle et la teneur est en principe la tierce. Les 8 modes ecclésiastiques médiévaux passent à 12 au XVIe siècle :
— l’éolien ou cantus mollis devient le mineur (éolien),
— l’ionien ou cantus durus devient le majeur ; tous deux avec leur mode plagal.
[La chaconne de Bach (2e partita pour violon seul) utilise comme thème mélodique la partie supérieure des 4 premières mesures ; mais les variations reposent en fait sur les 4 notes de basse, qui constituent un clair schéma cadentiel. Ce schéma, répété 64 fois, donne lieu à des variations extrêmement riches.
Pour les amateurs, voyez la partition ci-dessous, vous y voyez mieux cette variation.]

L’idée centrale du baroque est la représentation en musique des passions et des états d’âme. Pour la joie, on utilise le majeur, les consonances, le registre aigu, le tempo rapide (allegro), pour la tristesse le mineur, la dissonance, le registre grave, le tempo lent (mesto). Par rapport à la Renaissance, la musique baroque apporte un certain nombre d’éléments nouveaux : l’harmonie majeure/mineure, la basse continue, le style concertant, la monodie. les six passions fondamentales ; l’admiration, l’amour, la haine, le désir, la joie et la tristesse, connaissent des nuances innombrables et des combinaisons. Les instruments, de même que les tonalités servent aussi à rendre les passions.

Tonus Vertus
dorien Foi
phrygien mi Espérance
éolien la Amour
lydien fa Justice
mixolydien sol Force
ionien do Prudence
hyperéolien si bémol Modération


Au début du XXe siècle, il y a eu la “Nouvelle esthétique”.
Les anciens principes esthétiques - la musique en tant qu’un des beaux-arts - sont devenus parfois radicalement contestés. La musique n’est plus tenue d’être belle et harmonieuse ; elle doit avant tout être “vraie”, et donc parfois laide. Le but n’est plus d’édifier, mais de bouleverser l’homme. L’attitude face aux concepts de musique et d’œuvre d’art musicale se transforme :
— La modernité n’est plus régie par des règles objectives et intemporelles, mais se veut le reflet de son temps.
— L’avant-garde se voit comme un mouvement vers l’avant, qui s’oppose à toute espèce de stagnation, et veut s’ouvrir à l’audace.
— L’indétermination renonce à l’ancienne notion d’œuvre au profit d’une spontanéité parfois déroutante. l’aléatoire ouvre l’œuvre au hasard et à l’instant, de même que ce qu’on appelle la “work in progress” dont la forme est sans cesse en évolution. C’est ici qu’entrent le rap et la techno.

Le musette appartient lui, au mouvement “folkloriste” (début du XXe s.) qui manifeste un intérêt croissant pour les chansons et danses populaire : par réaction contre une culture musicale “noble”, dans une quête des origines ; dans le but de recueillir et de préserver une culture musicale spécifique qui sinon serait perdue. Mais bien sûr le musette a obligatoirement subit des influences “étrangères”, ce qui lui a permit d’évoluer.



Question ; Y a-t-il quelque chose à comprendre au jazz ?

Il y a des caractéristiques :
— Hot-intonation ; il s’agit des “dirty tones” (notes sales), chargées d’émotion, employées aussi bien par la voix que les instruments, avec glissés, poussés, vibrato, tremblements, soupirs, silences, bruissements, etc. les instruments imitent la voix chantée (singing horns).
— Blue-notes ; la tièrce et la septième alternent entre majeur et mineur, produisant des changements de couleurs plutôt que de mode, en particulier dans le blues.
— Off-beat ; ce sont tous les écarts par rapport à la battue (beat) régulière, de la syncope qui peut-être notée jusqu’au retards et aux ralentissements les plus subtils. c’est l’Off-beat qui crée le “drive” et le “swing” caractéristiques du jazz.
— Altérations ; le jazz emploie toutes les couleurs les plus riches de l’harmonie fonctionnelle, avec des influences post-romantiques et impressionnistes, jusqu’aux altérations ascendantes et descendantes simultanée de la quinte.
— Principe du “call-and-response” ; alternance, suivant le modèle africain, d’appels (call, statement) d’un chanteur et de réponses (response, refrain) du chœur, qui se chevauchent souvent (parfois avec des textes différents), réponse du piano, du trombone, etc.
— Improvisation ; c’est seulement la perfection exigée pour les enregistrements qui suscite des arrangements et des compositions écrites.
— Polyphonie ; les instruments mélodiques varient et ornent la mélodie, chacun suivant sa tessiture, son mode de jeu, son tempérament, donnant naissance à une hétérophonie et une polyphonie apparente.

Le blues (blue devils) est l’expression mélancolique de la détresse des esclaves noirs et la source du jazz, du blues paysan des origines jusqu’à aujourd’hui, en passant par le blues classique des villes. Le blues moderne, souvent purement instrumental, ne s’en tient ni à la structure classique ni au tempo lent.

Le Dixiland est la première imitation du jazz de la Nouvelle-Orléans par des musiciens blancs (Dixiland désignait au XIXe siècle les états du Sud des États-Unis). [Reliance Brass Band (1892/93) et Ragtime-Band (1898), dirigé par Jack “Papa” Laine ; Original Dixieland Jazz Band (1914), qui a beaucoup contribué à la diffusion du jazz (1er disque en 1917).

Chicago (1920/1930)
En 1917, après la fermeture du quartier de Storyville à la Nouvelle-Orléans, beaucoup de musiciens gagnent Chicago, Noirs et Blancs jouent ensemble. le style Chicago, marqué par la “hot-intonation” est illustré par des virtuoses comme King Oliver, Louis Armstrong, Jelly Roll Morton. [Formations les plus célèbres : King Oliver’s Creole jazz Band, avec L. Armtrong (1923) ; L. Armstrong and his Hot Five (1925) et Hot Seven (1927) ; Jelly Roll Morton’s red Hot peppers (1926).]
[Muskrat ramble d’Armstrong (enregistré à Chicago le 26/2/1926) emploie 2 chorus différents. La pièce tout entière est composée de 7 chorus (3 fois le chorus 1, 4 fois le chorus 2), 2 improvisations collectives encadrant 3 improvisations solistes.]

Swing (1930/40)
La capitale du swing est New-York, où la petite formation de soliste se développe en “big band”, pour lequel le spectacle est un élément essentiel. l’ancienne section mélodique est subdivisée : le pupitre des cuivres (brass section) en 4, le saxo en famille instrumentale avec la clarinette (reed section), les deux groupes ayant un chef de pupitre (lead, pour les solos) et des accompagnateurs (front line, side men). La section rythmique comporte davantage de percussions. [ Les principaux musiciens sont Charlie Parker (saxo alto), Dizzy Gillespie (trompette), Thelonius Monk (piano). le bebop marque aussi les solos des big bands ; après 1950 il évolue vers le hardbop.]

Cool jazz (1950/60)
Aux excentricités du bebop, le cool jazz oppose vers 1950 une musique de chambre raffinée : avec son jeu legato, ses mouvements linéaires sans accents marqués, son tissu contrapuntique, ses imitations, il s’ouvre à la tradition musicale européenne. [Musiciens : Lester Young, Gerry Mulligan et son quartet, Lennie Tristano, Miles Davis. le Modern Jazz Quartett avec John Lewis imite entre autres la polyphonie de Bach.]

Free Jazz (1960/70)
Avec le titre-manifeste d’O. Coleman, le jazz fait un dernier pas en direction de la musique moderne (post-sérialisme), en se libérant des conventions du jazz comme le beat, le chorus, l’harmonie tonale. Le Rythm’n’Blues permet au free jazz de renouer au milieu des années 60 avec le blues. [Musiciens : John Coltrane, Cech Taylor.]

Electric jazz (1970/80)
À partir de 1970 environ, le jazz utilise de plus en plus l’électronique sous l’influence du rock, vers 1975 naît le courant dit “mainstream”.

Voilà en gros ce qu’est le jazz :-)


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